Bonjour à tous,
Contrairement à mes dossiers tornades, ce topic se veut interactif. En clair ça m'aiderait beaucoup si vous répondiez en me donnant votre avis.
En effet, n'étant pas assez expérimenté pour effectuer cette synthèse tout seul, j'aurais besoin de vos avis de chasseurs sur ce qui va suivre, et je compte bien poster ce topic sur d'autres forums de chasse à l'orage. Ensuite une fois les différents avis recueillis, j'envisage de rédiger une véritable synthèse et la rajouter à mon dossier tornades en France, avant de transmettre ensuite ce dernier sur le tout nouveau site de Stormchaseradventure.
Bon autant vous le dire tout de suite, il y a deux ans jamais je n'aurais posté un tel sujet, la réponse me paraissant tellement évidente qu'il n'y avait même pas lieu de se poser la question.
Maintenant au vu de mes résultats d'enquête, j'arrive à me poser cette étonnante question tellement la réalité des tornades en France et en Europe apparaît différente des idées reçues communément véhiculées sur le sujet, y compris chez les passionnés de météo et les chasseurs d'orage. Des régions au taux de fréquence inattendu pour le néophyte et une réalité nationale bien au-delà de ce qu'on pense habituellement, déjà pressentie par Jean Dessens, bousculent en effet les idées reçues sur le sujet.
Alors bien sûr, attention à ne pas me faire dire ce que je n'ai pas dit ! Le débat se fait tout en nuances et la réponse quelle qu'elle soit ne peut qu'être circonstanciée et relative.
En France, nous avons face à cet aspect particulier de la chasse à l'orage une attitude qui balance sans cesse entre les deux extrêmes, irrationnalité entretenue par les apparences et les effets déformants de la médiatisation : entre raviver les braises de ceux qui disent "qu'on a jamais rien en France" et retenir par les bretelles tous ceux qui parlent de Tornado Alley dès qu'il y a un gros orage quelque part, la tâche de celui qui tente d'appréhender la réalité de manière objective n'est pas simple.
A leur décharge, faut reconnaître que vouloir être rationnel et objectif nécessite de tenir compte de multiples paramètres, que je vais détailler ci-dessous :
Mes résultats en terme de fréquence annuelle sur la France Ces résultats laissent apparaître des régions plus ou moins touchées qu'on commence à mieux cerner. Encore faut-il que ces résultats soient connus du plus grand nombre, ce qui est loin d'être le cas si l'on en croit les 99 % de sites météo qui traitent le sujet en se basant sur l'étude de Jean Dessens (étude de référence bien sûr, mais non actualisée).
Ceci dit, s'il est vrai qu'il y a des régions touchées, est-ce suffisant ? En clair, suffit-il d'aller dans le 17 ou le 62 pour être sûr de voir une tornade en cas de vague orageuse potentiellement tornadique ? Evidemment non, on s'en doute. On peut ne rien avoir du tout, ou alors apprendre ensuite qu'il y a eu une tornade à un tout autre endroit. Même aux USA la certitude n'existe pas non plus.
Réalité à échelle plus ou moins locale dans le quotidien et sur la durée, en opposition avec l'impression hypersubjective laissée par les médias Dans un chapitre de mon dossierTornades en France, en comparant avec la perception de la délinquance souvent hypertrophiée à cause des médias, j'avais parlé d'effet semblable en sens inverse pour les tornades en France. Supposons qu'après un épisode comme celui du 1er janvier 2007, on ait entendu le soir au JT "un petit tornado outbreak a frappé le Centre Ouest ce matin" ou alors que le 11 février on ait entendu "Une tornade a frappé Soulosse ss St Elophe, elle n'est pas encore classée mais on suppose une F2 ou une F3"... ça vous semble surréaliste ? Si oui, alors c'est révélateur à mon avis de la situation médiatique du phénomène en France. Est-ce similaire dans les autres pays d'Europe ?
Parallèlement à ça, on a tendance à oublier que même aux USA, les chasseurs peuvent parcourir des centaines de kms sans rien voir, voir des orages sans tornades, apprendre qu'une tornade s'est formée sur le lieu où il étaient alors qu'ils viennent juste d'en repartir, etc etc. Si j'en crois un excellent docu que j'avais vu une fois, la principale qualité requise pour chasser la tornade resterait d'abord et avant tout... la patience. Or, en France, ce facteur alea avec ses inévitables déconvenues à la clé (voir aussi plus haut) reste une source de découragement chez les chasseurs, qui aurait tendance à entretenir les idées reçues.
L'intensité et la longueur des trajets / durée Il est évident que ces paramètres jouent sur la perception du phénomène en France. Je ne m'étendrai pas sur ces différences climatologiques essentielles et évidentes, et me contenterai de souligner, en résumé, que la proportion de très grosses tornades sur le nombre total y est beaucoup plus réduite (heureusement !), et surtout que leurs trajets sont beaucoup plus courts et leur durée beaucoup plus brève. ça diminue d'autant la probabilité de voir des tornades en cours de chasse.
La petitesse des zones concernées par la fréquence des casAvec la petitesse en superficie couvertes des vagues orageuses, cette réalité climatologique française ne facilite pas non plus la tâche. Plus la zone est grande, plus on a de chances où qu'on soit de découvrir quelque chose. La France est un pays extrêmement compartimenté. Et il suffit que le trajet de la vague orageuse passe 100 km plus au nord ou au sud et hop la zone propice n'est plus concernée. Ce qui évidemment a moins de chances d'arriver si la zone en question fait 500 km de large.
En France parmi les zones les plus touchées, la plus grande reste le NPDC (qui se prolonge en outre en Belgique et jusqu'en Allemagne).
Autre paramètre très important : la prévision et le suivi en temps réel en France et en Europe des tornades Je ne parle même pas de MF, mais d'organismes tels Estofex qui font le boulot le plus ciblé dans le domaine. Or même eux ne peuvent que se contenter de dire "voilà à tel endroit, la situ météo suscite un risque léger/moyen/fort de tornades." Point barre. Après, on se débrouille. A ma connaissance, nous n'avons aucun suivi, aucune détection au doppler. Ce n'est évidemment pas pour critiquer leur travail remarquable que nous sommes ravis de pouvoir consulter, mais simplement pour dire que ça manque pour organiser une chasse.
Ici, nous sommes coincés dans un cercle vicieux : pas de moyens de suivis et de détection ==> recensement embryonnaire et peu d'études ==> pas de connaissances de la réalité du phénomène et fausses impressions ==> pas de chasses ciblées ==> pas de témoignages probants ==> pas d'intérêt suscité et donc pas de motivations pour se donner les moyens logistiques pour faire de la prévision et du suivi ==> difficultés pour chasser etc...
La répartition saisonnière des tornades et l'importance des tornades d'hiverOn compte 20 % de la totalité des cas recensés en France d'après les travaux de JD (et sans avoir vérifié je pense qu'on a à peu près le même chiffre encore actuellement). Déjà à mon avis, on devrait davantage prendre en compte les orages et tornades d'hiver au lieu de toujours considérer qu'en Octobre tout est fini
Mais sait-on aussi que dans les zones françaises les plus tornadiques, les évts ont lieu pratiquement autant en hiver qu'en été, voire peut-être plus ? Là encore, le manque de connaissance de la réalité des tornades en France joue énormément. Saviez-vous que dans le 17 la totalité des plus grosses tornades recensées a eu lieu en hiver, avec une F4 en janvier, des F3 en octobre ou en novembre ? Ces données sont évidemment à relativiser compte tenu des énormes lacunes de recensement de cette région. Mais on peut quand même se dire que les tornades hivernales y sont loin d'être négligeables, et il serait intéressant d'étendre ces stats aux autres zones tornadiques littorales, comme le NPDC ou l'Hérault. Les résultats pourraient vous surprendre...
Les habitudes de chasseurs français Mes quelques maigres expériences de chasse m'ont tout de suite fait sentir que la recherche de tels ou tels phénomènes nécessite des techniques de chasse spécifiques : être plusieurs, à plusieurs voitures, privilégier certaines observations ( bases nuageuses...). Pour ma part, j'ai pu un jour apercevoir de très loin la tornade de Lamotte Beuvron du train, après avoir zieuté les bases durant plusieurs heures. Comment se fait-il
qu'aucune de nos tornades significatives françaises n'ait été photographiée par des chasseurs, et qu'il nous faut toujours compter sur les réflexes des témoins pour obtenir des photos du phénomène ?
Outre les habitudes de chasse, je pense aussi que le nombre de chasseurs joue un rôle là-dedans, la chasse n'étant pas encore aussi développée en France qu'ailleurs.
Mais le rôle des habitudes et des a prioris n'est certainement pas négligeable. Vouloir photographier la foudre en priorité, qui amène souvent à la chasse de nuit, limite au maximum tout ce qui relève du visuel hors éclairs. Si on acceptait également de faire davantage de kms, ça augmenterait évidemment les chances. Enfin, beaucoup de chasseurs sont seuls et encore inexpérimentés en France...
Bon évidemment chacun reste libre dans ses objectifs et ses priorités. On aura bien compris qu'ici je cherche juste à analyser ce qui se passe dans notre pays.
Donc en gros pour résumer :
Oui bien sûr, la réalité est différente de celle des USA à la fois en terme de fréquence (aux 10 000 km2) et en termes d'intensité. Bon ça c'est pas une nouveauté. Et si cette réalité se rapproche plus qu'on ne le pense de celle des USA, il s'agit de certains coins très précis et uniquement en termes de fréquence, donc c'est pas une généralité non plus, loin de là. Et quand on sait que les coins en question ne sont pas les plus orageux...
Par contre un exemple, un seul exemple, pourrait suffire à illustrer tout ce qui est dit plus haut dans ce post :
Le 1er janvier dernier lors de cette violente ligne de grains et surtout sous son ciel de traîne, le chasseur qui aurait pu descendre en Saintonge, Aunis, sud 79 ou sud 86 avait des chances réelles de récolter une tornade sur l'objectif, au moins de loin : plusieurs grosses tornades validées le même jour dans le coin (et donc certainement accompagnées de multiples tubas et petites trombes passés inaperçus), situ météo typique des tornades hivernales, présence parmi les coins concernés de la région la plus touchée de France en moyenne annuelle, paysage plat qui libère la vue sur des dizaines de kms...
Ce jour-là, si les équipes avaient été plus nombreuses et mieux organisées, si la prévision et le suivi avaient été plus pointus, si on avait eu déjà dans l'esprit "qu'il y en a" et qui plus est dans ces régions... , et bien
oui, je crois qu'on aurait pu partir en chasse en ciblant la tornade. Pas la F3 ou la F4 bien sûr, plutôt le tuba bien "mûr" ou la petiote qui taquine un peu le sol, mais les chances d'en trouver étaient réelles. Des petites trombes ont été très précisément décrites dans Ouest France Vendée, et les quelques grosses qu'on a eu (Couhé, Lachaise...) étaient certainement visibles de plusieurs dizaines de kms.
Et pourtant... Quel chasseur français a réellement pris conscience de ce qui s'est passé ce jour-là ? A mon avis pas grand monde.
Et le cas est loin d'être isolé. Dans mes suivis charentais, on pourrait relever bien des situations similaires et sur la France entière, les épisodes donnant au moins 2 tornades ne sont pas rares. En cette année 2007 pourtant réputée calme, on peut déjà compter l'épisode du 1er janvier en centre ouest, celui de février dans les Vosges (Soulosse Ss St Elophe), celui du 15 août...
Alors bien sûr, vous me direz : une fois le Tirage du Loto effectué, ça paraît toujours simple d'avoir les 6 bons numéros. Oui bien sûr... sauf que là, à partir du moment où on suppose une vague orageuse potentiellement tornadogène, les conditions humaines et logistiques énumérées ci-dessus étaient quand même beaucoup plus faciles à réunir.
Les freins sont donc à mon avis autant une question d'état d'esprit, de nombre, de disponibilité et d'organisation des chasseurs qu'une question de réalité climatologique.
Donc en règle générale (sous réserve de vos éventuels avis et objections), je continue à penser que le plus raisonnable pour le chasseur français resterait d'envisager la chasse
à l'orage, en considérant la tornade comme une simple "cerise sur le gâteau" possible, surtout dans certaines régions où le risque est supposé faible. Mais déjà sans négliger cette possibilité, ne serait-ce que pour des raisons de sécurité (cf mésaventure survenue à Remy et ses compagnons dans le 31 à Lamasquère).
Et en cas de situation météo vraiment à risque comme ce 1er janvier dernier, pourquoi ne pas partir avec -aussi- l'objectif tornade ? Le recensement s'en trouverait boosté et une véritable dynamique pourrait s'en trouver impulsée. On peut peut-être y croire... ?Et puis surtout, et ce n'est pas le moindre parmi mes objectifs, ça permettrait aussi d'éviter de possibles accidents dus à la méconnaissance, au manque de préparation et à l'effet de surprise...
Voilà pourquoi, enfin, je pense que Michel a raison de vouloir optimiser et rationnaliser la chasse dans notre groupe.
Voilou j'arrête mon bavardage. Vos avis maintenant... ?